La génération actuelle des jeunes de moins de 25 ans
vit depuis son enfance dans un système capitaliste qui prône le libéralisme
économique et les libertés individuelles. Cette génération vivant en Occident
n`a pas connu la bipolarité politique lorsque le monde était divisé en deux
blocs ; d`un côté le communisme représenté par l`U.R.S.S et de l`autre le
capitaliste des États-Unis. Il est donc normal pour ses jeunes gens de croire
que le libéralisme économique s`est imposé et que le débat d`idée va
s`amoindrir. Il faut cependant comprendre que le l`idéologie du libre-marché
est loin d`être parfaite et que le
débat devrait continuer pour que
l`évolution de notre société continue et ne stagne pas. C`est dans cette
optique que seront analysé deux textes ; premièrement La démocratie au-delà du libéralisme qui aborde le thème de la
place du libéralisme dans nos démocraties actuelles et deuxièmement, La condition moderne selon Marcel Gauchet
qui utilise comme méthode une démarche d`analyse historique et conceptuelle
pour tenter de comprendre les transformations du monde moderne. Chaque texte
sera résumé, pour ensuite élaborer une comparaison des similitudes et des
différences des deux textes dans le but de constater ou non si les auteurs ont
un point de vue semblable sur le libéralisme économique
et sa place dans nos sociétés occidentales.
La condition
moderne selon Marcel Gauchet
Comme mentionné dans l`introduction, Gauchet utilise
une démarche d`analyse historique et conceptuelle des œuvres historiques et il
pratique la macroanalyse pour couvrir la période des débuts de la modernité à
aujourd`hui.
Il débute en indiquant que la démocratie ne fera pas
son apparition sans rencontrer de défis. Il avoue que le but premier des hommes
de l`époque des débuts de l`ère moderne n`était pas nécessairement le
libéralisme, mais ils étaient plutôt en : « faveur d`un
autoritarisme dirigiste ou d`un collectivisme égalitaire » (Lessard, 2010,
p.188). Mais pour pouvoir espérer sortir
la religion des institutions politiques, Gaudet écrit que : « le
régime qui sera le plus intimement lié à la modernité sera celui de la
démocratie libérale, un régime mixte » (Lessard, 2010, p.188). Selon
l`auteur, les hommes de l`époque choisiront de bâtir un régime qui aura pour
conséquence les structures de notre monde moderne, avec trois dimensions : le politique, le
droit et l`histoire.
La première action sera d`adopté la forme de
l`État-Nation, étape du politique pour se libérer du religieux au profit d`une
institution souveraine. L`auteur aborde cependant le sujet en précisant que la
rupture n`est pas brutale et que les deux mondes devront coexister pendant au
moins deux siècles. Côté politique, ce
nouvel État devra « assurer de maintenir
la cohésion d`ensemble de la communauté »
( Lessard, 2010, p.189).
La deuxième étape pour rendre le processus légitime
viendra du droit et c`est sur les droits individuels que se basera cette
approche. En effet, le mouvement de l`époque est grandiose et plusieurs
auteurs, dont Locke et Rousseau, contribueront aux droits des libertés
individuelles. Selon
Gauchet, : « l`identification d`un pouvoir et d`une communauté
demeurera la règle à l`âge moderne. Cette identification contribuera à
maintenir la figure tout à fait centrale de l`Un. Ainsi, à l`Un religieux
succédera l`Un moderne » (Lessard, 2010, p.190).
La dernière étape pour sortir la religion sera
l`histoire. Une nouvelle compréhension des faits historiques permettra à
l`homme de pouvoir prendre conscience qu`il est son propre architecte de son
destin et qu`il n`est plus soumis à la volonté divine. Selon l`auteur ces trois
étapes font parties d`un processus et aurait pu être modifié.
Gauchet continue en expliquant que la société, via
son principe historique, comprend qu`elle doit gagner son indépendance face au
droit et au politique et ceci peut être perçu comme un signe de la sortie de
l`âge de l`Un. Le politique ne disparait pas , il prend plus la place de
médiateur entre la société et le pouvoir chargé de représenter cette société
pour ainsi être au service de l`immanence sociale : « la nation
assure une certaine cohésion à une société qui ne cesse de se percevoir comme
autonome et l`État garantit la stabilité à la sphère politique marquée par les
changements successifs de gouvernants » (Lessard, 2010, p.191). Viendra alors les modèles sur qui
s`appuieront la société libérale : la société, la science et le progrès.
Dans la deuxième partie de son texte, l`auteur aborde la crise du
libéralisme. En effet, le développement du grand capital et l`organisation du
monde ouvrier offre une situation de société d`organisation, un opposant certes
à la forme politique libérale. L`auteur ajoute que : « la distinction
de la société civile et de l`État restait subordonnée au souci de l`unité collective et donc du
lien étroit à maintenir entre l`État et la société civile. Dorénavant […] la
société civile agiront en fonction de leurs intérêts, librement »
(Lessard, 2010, p.192).
Une certaine opposition surgit entre gouvernés et
gouvernants. Selon Gauchet, la création des partis politiques dans les années
1900 aura créé un effet médiateur entre la société civile et la politique. Le
peuple voulait à l`époque la création d`un gouvernement qui représenterait les
intérêts du peuple, et non seulement ceux du régime capitaliste et les
entreprises.
Il y aura alors résurgence politique et plusieurs
crises affecteront les régimes démocratiques. L`État-nation reviendra avec un
sentiment d`appartenance et en intervenant dans plusieurs secteurs de la
société. « C`est la concession que
le libéralisme doit faire s`il veut survivre : il sera au service et à
l`écoute de la société et de ses revendications » (Lessard, 2010, p.193).
L`État maintient désormais l`unité
collective. L`auteur termine en parlant des nombreuses crises identitaires
suite aux crises économiques et guerres mondiales et des nombreuses idéologies
qui n`auront pas survécues longtemps.
La démocratie
au-delà du libéralisme
Les principales hypothèses que développent les
auteurs Breaugh et Dupuis-Déri sont que le libéralisme, « au lieu d`être
la condition nécessaire et suffisante de la démocratie, était en réalité une
entrave à la réalisation des promesses
démocratiques. […] Et […] la logique des droits individuels était un obstacle
à l`émancipation de l`humanité »
(Holeindre, 2009, p.775). Les
auteurs veulent démontrer que le libéralisme n`est pas la solution et qu`il en
existe d`autres pour le bien de la démocratie.
Ils abordent d`abord la définition de l `État libéral
qu`ils qualifient comme étant : « d`abord un instrument créé de
toutes pièces par les hommes pour
organiser le gouvernement de la société par elle-même. Les citoyens désignent,
par l`élection, des représentants qui sont censés exercer le pouvoir au nom de
la société et de l`intérêt général » (Holeindre, 2009, p.775). Cependant,
l`État faillit à sa tâche et devient un instrument de domination de la société.
Un autre problème du libéralisme est lié avec le fait
que les partis politiques sont divisés
entre leur rôle de représentants du peuple et avec les lignes de partis,
ce qui a comme conséquence que les partis politiques s`éloignent de leurs bases sociales et instaure un
système bureaucratique qui nuit à la démocratie. « Autrement dit, l`État
et les partis politiques confisquent la démocratie à la société alors qu`ils
sont supposés en être l`émanation » (Holeindre, 2009, p.775). Les auteurs continuent leur critique en
expliquant que le libre marché favorise les réalisations des libertés
individuelles, mais que la différence et la compétition entre le secteur public
et privé nui à la réalisation de l`idéal commun. Ils vont plus loin un écrivant
que l`État s`occupe entièrement de sa gestion et que la société ne détient plus
de pouvoirs, mise à part lorsqu`il y a des élections!
Breaugh et Dupuis-Déri discute alors de la
possibilité de créer d`autres modèles pour la démocratie, comme une
« conception participative de la citoyenneté » (Holeindre, 2009,
p.776). Ils abordent aussi la
possibilité d`utiliser un système qui prônerait une démocratie par le bas, il y
aurait alors moins de bureaucratie. Il affirme que « le réalisme est du
côté de l`autogestion, qui fonde la délibération sur l`expression réelles des
conflits » (Holeindre. 2009, p.776).
De plus, le libéralisme et la démocratie sont plus
antonymes que synonymes selon les auteurs. Selon eux, le libéralisme prônes les
inégalités économiques et sociales en se basant sur les libertés individuelles,
tandis que la démocratie aspire à l`égalité de tous et « est nécessaire à
l`humanité, mais les tensions générées par l`économie capitaliste empêchent la
réalisation de ce but moral » (Holeindre, 2009, p.776). L`auteur Francis
Dupuis-Déri propose même une idée qui
pourrait être qualifié d`extrémiste : « le libéralisme est un
système autoritaire, car l`égalité par le droit qu`il proclame masque une
inégalité de fait sur le plan économique » (Holeindre, 2009, p.776).
Les auteurs terminent en expliquant que le conflit
est nécessaire à la démocratie car c`est
cela qui le différencie des régimes totalitaires qui prétendent détenir la
vérité : « la démocratie ne peut se réduire au fonctionnement des
institutions et des gouvernements, car c`est avant tout une expérience sociale
qui engage le peuple tout entier » (Holeindre, 2009, p.777).
Comparaisons
et questions
Tout d`abord il faut constater que les deux textes
abordent les mêmes thèmes, la place du libéralisme dans notre société
occidentale moderne, mais il faut aussi voir que leur approche est complètement
différente. Gauchet utilise une démarche d`analyse historique et conceptuelle
tandis que Breagh et Dupuis-Déri font plus une démonstration critique. De plus,
Gauchet y va d`une macroanalyse, tandis que les deux auteurs y vont d`une
microanalyse.
Les deux textes abordent des mêmes concepts et
définissent de façon assez similaire l`États, les partis politiques, la
démocratie et la modernité.
Il y a aussi similitudes lorsque les thèmes du modèle
de « l`Un » sont abordés des deux côtés, dans le sens ou l`État se
doit d`intervenir pour assurer le maintien de l`appartenance. Il s`est
débarrassé de l`Un religieux pour aller vers l`Un moderne.
La société civile est aussi représentée par les
auteurs mais de façon différente. Du côté de Gauchet, du a son analyse
historique, tente de présenter les étapes que le secteur privé a su s`imposer
dans ce libéralisme économique. Du côté des deux auteurs, ils en font plus une
critique car l`État leur donne des avantages et des pouvoirs au profit de la
société.
Selon les deux auteurs, les institutions doivent
détenir le pouvoir dans le but d`améliorer les égalités entre tous les
citoyens. L`État se doit d`intervenir pour répondre aux besoins des plus
pauvres, comme des plus riches pour qu`il n`y ait pas d`inégalité. Le
libéralisme économique est cependant un obstacle à la démocratie pour Breagh et
Dupuis-Déri, tandis que la doctrine économique est bonne mais dois être entre
les mains d`un État-nation fort qui intervient.
En conclusion, bien que les deux textes font une
critique du libéralisme économique dans nos sociétés, les auteurs utilisent une
méthode complètement différente et Breagh et Dupuis-Déri sont plus virulents
dans leurs propos et souhaitent même la disparation du libéralisme à long
termes, sans toutefois avancer l`idée d`une autre idéologie. Il constate que
les inégalités économiques qu`engendrent le libéralisme économique sont
incompatibles avec la démocratie libérale. De son côté, Gauchet indique que le
libéralisme et la démocratie ont suivis un processus qui aurait pu être
différend. Il prône l`État-nation pour tenter d`amoindrir les inégalités
sociales et économiques, mais il constate aussi que les États occidentaux
commencent à avoir une dette importante et que la société doit faire des choix
au détriment du secteur privé. Un débalancement va se produire dans les
prochaines années en faveur du secteur privé que prône le libéralisme et une
solution doit être trouvée selon lui. Les auteurs de ses textes ont soulevés un
grave problème, sans toutefois apporter de solutions concrètes. Il serait
intéressant de continuer cette étude en cherchait d`autres alternatives.
Bibliographie
Jean-François
Lessard (2010). La condition moderne selon Marcel Gauchet. Canadian Journal of
Political Science, 43, pp 187-196
Jean-Vincent Holeindre (2010). La démocratie au-delà
du libéralisme. Perspectives critiques, Martin Breaugh et Francis Dupuis-Déri
(dir.), Athéna éditions, Montréal, 2009, 196 pages. Canadian Journal of
Political Science, 43, pp 775-777
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